les amants de la St.Jean
bronze h.72cm 1998
fonderie du Gour
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Depuis 30.000 ans, depuis les premiers gestes d'art des humains, la Grande Tradition de la sculpture a été le rendu de la femme, sa beauté. Depuis les débuts de ma sculpture, et parce que des femmes comptaient dans ma vie, je sais ma main habile et vive de cette longue Tradition - fidélité créatrice. Sculpter, de même qu'aimer, c'est correspondre à ce qui m'oblige, m'entraîne, me comble d'une diversité et d'une prodigalité sans fin. Femme de chair ou œuvre sculptée, c'est l'aventure du regard et de la main : ici comme là, une nudité, un seul à seul, un corps à corps, un rapport de douceur et de force dans lequel il faut se livrer tout entier. Loin de moi les sculpteurs de la Renaissance, jusqu'à Rodin, qui se débattaient dans leur dualisme d'époque (entre l'ange et la bête, l'âme aspirant à Dieu et retombant dans la matière...), plus loin encore les sculpteurs du XXe sc. sans aménité avec la femme. Je n'éprouve ni répugnance ni déchéance en allant une sculpture, mais au contraire, un goût fort et un contentement, un débat et une exigence, tout en résonances avec la rencontre de la femme. J'aime pressentir de Dieu une altérité infinie qui, infiniment proche, se donne hors de son atteinte, s'efface et se fond à la discrétion des visages d'altérité des miens, et d'abord la présence de la femme - la plus autre, proche, donc désirable. Alors si j'en risque une expression sculptée, l'exigence de ne pas me méprendre n'est pas moindre que dans une prière, sauf l'avantage de l'aménité qui m'accompagne jusqu'où je peux, qui me donne ma forme et entraîne mon allant d'homme, qui tempère l'insatisfaction de l'inachèvement et calme le tourment de son impossible perfection, sans éteindre, au contraire, le désir d'aller toujours au-delà le mystère, le précieux et l'intime de l'autre. Sa séduction.